Calendrier de l’Avent 16 Décembre

Jour 16 : Une suite en devenir


Comme cela est arrivé souvent, bien que très focalisé sur ma série de space opera, de nombreux lectrices et lecteurs me réclament des suites à mes romans. Assez souvent, cet engouement de fans m’inspire et me conduit à « prendre la plume » afin de plancher sur une nouvelle aventure.

Après la publication de Mycélium, chez Octoquill Editions, à nouveau, plusieurs lectrices et lecteurs m’ont transmis leur goût pour l’univers comme pour les personnages en me réclamant une suite.

L’inspiration étant au rendez-vous, j’ai profité du NaNoWriMo 2021 pour commencer ce nouveau opus. En voici quelques lignes, j’espère que les fans apprécieront !


Painted Desert, en Arizona, un lieu magique pour bon nombre de touristes du monde entier. L’un des endroits les plus colorés de la région. 215 millions d’années avant la venue des hommes, au Trias supérieur, des sédiments s’y sont déposés, empilant des strates d’argiles formant, désormais, des montagnes polychromes. Là, se déclinent toutes les nuances d’ocres, de jaunes, de violets, de rouilles, et de bruns. Une zone aride et peu défigurée par des routes, ce qui est bien mieux ainsi, où la meilleure manière de la découvrir est de l’arpenter à pied.
Bryanna Vanoua y cheminait justement ainsi, petite silhouette se glissant dans les ombres des collines et montagnes parsemant la région désolée. Forme solitaire, aussi, car bien rares sont les visiteurs nocturnes de cette partie de l’Arizona. Une erreur manifeste, car d’évidence le meilleur moment pour profiter de la myriade d’étoiles parsemant le ciel de velours. Surtout en cette période où la lumière de la Lune, dans son premier quartier, ne suffisait pas à ternir les lueurs clignotantes des astres lointains.
Pourtant, la femme esseulée ne paraissait pas s’intéresser aux beautés minérales ou célestes. Elle avançait d’un pas rapide, comme mue par une cause impérieuse la forçant à rejoindre son but au plus vite. Dans son visage se lisait une détermination farouche, très en phase avec les lieux, inclus dans le territoire navajo.
Un profond silence régnait autour de Bryanna. Même ses pas, aériens, ne faisaient pas rouler de pierre ni même courber les feuilles des rares arbustes. À la manière d’un fantôme, la voyageuse nocturne allait de l’avant, l’esprit concentré vers sa destination.
Elle passa ainsi, presque sans s’en rendre compte, tout près du point d’atterrissage de la capsule de secours empruntée à la Lunar orbital platform-gateway en orbite de halo autour de la Lune. Un an plus tôt, jour pour jour, heure pour heure, une dénommée Moyah Bheret y avait posé le pied sur la Terre après une éprouvante mission sélène .
Toutefois, la femme solitaire ne parut pas se souvenir de cette affaire, continuant à cheminer à son rythme sans s’écarter de sa voie.
Enfin, elle obliqua le long d’une saillie dans le roc, trouvant sous ses pieds un sentier à peine tracé, plus une ravine, d’ailleurs, qu’une véritable sente. Toujours d’un pas égal, comme si aucune aspérité du sol ni le dénivelé ne pouvait entraver sa marche, Bryanna avançait sans dévier de la trajectoire connue d’elle seule.
En toute franchise, cela n’était pas du tout le cas. En effet, même si elle cheminait d’une démarche résolue sans une once d’hésitation, en vérité, elle ne savait pas où elle se rendait. À la manière d’une marionnette manipulée par une destinée invisible et implacable, elle se mouvait, certes, mais sans conscience.
Soudain, elle se glissa dans une anfractuosité, une fissure à peine assez grande pour lui livrer passage. Puis, elle remonta un long tunnel, un boyau naturel depuis longtemps abandonné aux insectes et aux reptiles. Pourtant, c’est sans peur que la femme esseulée progressait sans un regard en arrière. Même l’obscurité des lieux souterrains se trouvait incapable de lui faire rebrousser chemin ou, au moins, de ralentir sa marche décidée.
La galerie s’acheva dans une vaste caverne aux parois striées par les multiples couleurs des sédiments préhistoriques. Hélas ! en l’absence de lumière, la visiteuse ne pouvait se remplir les yeux de leur beauté intrinsèque.
Qui plus est, elle n’était pas là pour admirer les trésors de Painted Desert, fussent-ils uniques en leur genre. Non, son voyage avait un autre but, désormais atteint. Car, au centre de la grotte, telle une colonne construite à dessein pour soutenir le plafond constellé de traces de moisissures, se dressait une silhouette de grande taille. Non pas une stalagmite naturelle, enfin pas seulement, mais bel et bien un organisme vivant.
Un homme se trouvait-là, son corps en partie noyé dans la pierre couverte de champignons cavernicoles, enchâssé dans le minéral à la manière d’une pierre précieuse dans un bijou. Un individu plutôt jeune, la trentaine, mais au visage vieilli par sa situation contre nature. Il portait des lunettes de professeur, toutefois, le métal des montures en était si oxydé qu’il semblait sur le point de tomber en poussière. Malgré sa position étrange, maintenu en hauteur par la structure même l’entravant, et l’épaisse couche de mycéliums recouvrant son organisme malmené, les yeux de l’homme demeuraient vifs, vivants, conscients de son agonie.
Bryanna Vanoua reconnut le malheureux au corps prisonnier de la roche et poussa un long hurlement à glacer le sang.
Elle s’éveilla soudain sur ce cri inhumain d’âme damnée, se retrouvant de nouveau dans son lit, comme chaque fois qu’elle endurait le même cauchemar récurrent…
Un simple coup d’œil sur sa table de chevet l’informa sur l’horaire : 23 h 59 (jeudi 11 novembre 2032). C’était d’ailleurs souvent aux alentours de minuit que le rêve envahissait son esprit !


La suite, dès demain…

Christian Perrot – 2022 – Tout droits réservés – contact.christianperrot@yahoo.fr