« En revenant du cimetière, Romuald retourna directement à l’appartement de sa mère. Certes, ses amis s’étaient bien proposés de l’accompagner, mais il avait poliment décliné leur offre. Il préférait demeurer seul un moment. Ses mains tremblaient tellement qu’il dût s’y reprendre à trois reprises avant de parvenir à faire tourner la clé dans la serrure. A peine la porte refermée derrière lui, il s’y adossa en laissant son souffle se stabiliser.

« C’est fait ! » pensa-t-il en fermant les yeux quelques minutes.

En effet, sa mère, Catherine, reposait à présent dans sa dernière demeure, laissant son fils unique comme ultime porteur du nom familial. Catherine avait dépassé les quatre-vingt-cinq ans sans hélas parvenir à atteindre les quatre-vingt-dix. Après avoir traversé la plus grande partie de sa vie sans aucune maladie ni faiblesse apparente, le temps semblait l’avoir subitement rattrapée vers ses quatre-vingt-six printemps. Elle s’était ensuite rapidement étiolée chaque jour un peu plus jusqu’à plonger dans son dernier sommeil.

Revenant à l’instant présent en ouvrant les yeux, Romuald remonta lentement le couloir conduisant au salon. En y entrant, il ne put s’empêcher de sourire en voyant l’énorme plante de variété indéterminée envahissant tout un coin de la pièce en s’incurvant le long du plafond. Combien de fois avait-il suggéré à sa mère de se débarrasser de cet hôte envahissant : des dizaines ou des centaines ? Effectuant un long regard circulaire, il grimaça en passant en revue les nombreux cadres ornant les murs et le représentant à tous les âges de sa vie.[…] »

Christian Perrot – 2020 – Tout droits réservés – Contact : christian.perrot@yahoo.fr